CABINET DE PSYCHOLOGIE PSY2A
22 SEPTEMBRE 2019
L’énigmatique question du suicide au Mali
Entre Tabous et prise de conscience « voilée ».
Le suicide. Qu’en est-il au Mali?
Oh oui! Vous avez bien lu… Il s’agit bien du suicide!
- Qui pourrait croire que cela existe (depuis fort longtemps) chez nous au Mali ou en Afrique?
- Qui ose avouer aux autres que la mort de ce proche qui nous a quittés est mort par suicide? Quel serait ce regard si louche des autres, cette société sans pardon et qui est de plus en plus frustrante. Quel serait le jugement sanglant des soi-disants ô combien croyants: chrétiens ou musulmans,extrémistes ou pas?
- Pourquoi pense t-on toujours que seuls les occidentaux peuvent en arriver là?
Non, chères lectrices et chers lecteurs.
Malheureusement, nous sommes bel et bien confrontés à cet «échec social», même si fort heureusement, les statistiques démontrent que la majorité de celles et ceux qui commettent l’acte suicidaire échouent en partie. Je dis bien en partie. Car, si certains décèdent par la suite de leurs actes, d’autres sont susceptibles de «rejouer» ce geste de désespoir. Certains en sortent avec des séquelles à jamais!!! Je ne saurais oublier de mentionner qu’une nouvelle tentative de suicide (TS) n’est jamais éloignée. Ils y pensent. Oui, ces jeunes filles ou ces femmes déboussolées y réfléchissent et innovent de nouvelles stratégies. Elles se disent qu’il faut qu’elles soient une prochaine fois plus discrètes, plus adroites! Conseil 1er: Soyons alors doublement vigilants envers celles et ceux qui l’ont tenté une 1ère fois. Jamais 1 sans 2, dit l’adage… Mais, l’exception fait partie des règles.…Espérons alors qu’il n’y aura donc pas une deuxième fois. A condition(s) que….
DÉSESPOIR
«J’ai toujours cru que ça n’allait jamais m’arriver. Non, pas à moi… Je n’en peux plus…La vie n’a plus de sens cette fois-ci»!
CULPABILITÉ. HONTE
«C’est de ma faute. Tout le monde me le répète sans cesse. Quel drame pour moi, ma famille,mon ethnie? Je n’aurais pas dû….»!
IMPUISSANCE
«Je suis seul(e) dans ma tristesse, dans ma souffrance. Rien ne me réconforte, même mes meilleurs amis, même ma foi en Dieu»!
Osons affronter les tabous.
Le suicide se définit comme étant une intention volontaire par un individu (un homme ou une femme, jeune ou moins jeune, pauvre ou riche) de vouloir se donner la mort suite à un profond sentiment de détresse qui le/la plonge dans l’impuissance et parfois la dépression.
Pourquoi des pensées suicidaires inattendues par l’entourage?
Tout d’abord, sachons que l’humain est universel. Nous rions quand nous sommes bien dans notre tête et/ou dans notre peau… Nous pleurons aussi par endroits. Parfois, trop même… Beaucoup trop… On perd les pédales…On ne sait plus à quel Saint se vouer. A quel ami(e) ou parent se confier….La vie est ainsi faîte. On se demande comment peut-on se (re)trouver tout seul dans un monde de plusieurs milliards d’individus…? Ce monde-là devient ainsi bizarre aux yeux de nous, les adolescents. Au fait! Il parait que ces adultes sont bizarres, horribles, sans pitié envers des plus faibles. Oui, nous, les parents, nous pouvons être très bizarres. Oui, un père peut être refoulant, pas du tout à l’écoute. Oui, cette mère qui nous a porté durant 9 longs mois dans son ventre, arrive parfois à blesser au plus profond de nous. Ses mots sont jugés rudes par les auteurs d’actes de suicides qui échappent à la mort. Elles blessent, ces mères, cognent comme un coup de foudre…
Oui, ces ados me disent en consultations: «Nos parents qui nous mettent au monde, nous dénigrent jour et nuit. En plus, ils ne sont jamais là. Ne sont plus complices ou ne l’ont jamais été alors que nous n’avons pas demandé à venir sur terre»….!
Paroles d’ados…J’en ai des exemples et des exemples à vous livrer. Heureusement que tout est anonyme. Sinon, certains d’entre vous (parents, amis, maris, épouses) ne les lâcheraient plus une seule seconde…
Certains messages nous sont très parlants en consultations, alarmants et nul n’en prête attention…Sauf, le psy! Dixit un adolescent. Aussi faudrait-il arriver à venir voir le psy avant l’irréparable, ajoute t-il.
L’acte suicidaire est peu à peu en gestation dans une petite tête..D’ailleurs, un patient précise: «J’ai eu une sacrée chance de ne pas commettre l’irréparable..Il me fallait juste un peu d’écoute…Non…Beaucoup d’écoute! Le psy, c’est magique…Même si je me disais que ça ne sert à rien..C’est un truc de blancs. Et voilà, j’ai vite compris qu’il en est loin de là! Tous pareils…Tous humains..Tous môgô»!
A RETENIR
Parfois, nous assistons à certains propos assez surprenants de nos proches ou amis qui s’amusent à dire qu’ils en ont marre de cette vie…Puis, on constate un changement radical dans leurs comportements, leurs façon de vivre, leurs relations sociales. Ils deviennent distants, ne s’adonnent plus à leurs habitudes en termes de loisirs ou d’éclats de rire. Ils s’éloignent, se replient sur eux-mêmes.
Bien qu’il ne faut pas systématiquement penser à ce que ces connaissances et proches préparent un suicide, il faut vite mesurer le poids de leurs mots, je dirais M-A-U-X. .Ils sont sans aucun doute à surveiller quand ces propos deviennent redondants…Alertons en silence. Soutenons les dans leurs récentes épreuves de vie traumatisantes pour eux et pas forcément pour nous.
En plus, nous les ados, on a du mal à comprendre que ce corps d’ado qui est en nous est aussi très bizarre! Ces mutations physiologiques…Cette moustache qui pousse et ressemble peu à peu à celle de papa alors que je n’en veux pas…ça rend vieux….! Ces menstrues qui me tombent dessus alors que je n’ai à peine compris ce qui m’a été expliqué en classe!!! Maman ne m’en a jamais parlé. Elle se gêne! Pourquoi nos meilleurs amis de jeunesse peuvent nous briser les cœurs et à jamais… Oui, elle peut être rude cette période d’adolescence. L’âme est unique. Le cœur devient par circonstance fragile, pour ne pas dire très fragile. Peu importe les origines sociales, professionnelles, le statut économique et la religion de l’auteur d’un acte de suicide, la question est brûlante, tabou, rageante par endroit et partout dans le monde…
Faire face à une détresse psychologique
S’il y a un conseil à donner au prime abord, c’est de ne pas négliger un individu qui souffre, qui se plaint régulièrement d’un mal-être qui le ronge, de soucis récurrents. Chaque cri de cœur est un appel au secours, à l’écoute qui fait très souvent défaut dans notre société où il a peu ou plus de solidarité, à la recherche d’une solution à un problème qui pèse et qui fragilise l’être humain.
Quels sont les risques après une 1ère tentative de suicide?
L’homme ou la femme qui a déjà commis une tentative de suicide, s’il n’est pas rapidement pris en charge socialement en lui accordant plus d’attention, d’affection, de soutien parfois financier, il peut s’enfoncer dans une détresse qui peut vite le sombrer davantage. Très souvent, l’auteur d’une tentative de suicide, même ici en Afrique, miroite bien son « plan d’action » en pesant le pour et le contre de son acte. Sa solitude est sa faiblesse qui le ronge et qui lui fait perdre espoir de ne pas pouvoir se relever.
Une de mes patientes en profonde détresse lors d’une consultation faisait état de son impuissance totale et voulait encore une fois passer à l’acte:
“Docteur, Laissez-moi partir… Pourquoi ne voulez-vous pas que j’en finisse? Personne ne le saura, sauf vous. ». Fort heureusement, nous avons pu déjouer sa tentative. Prenant conscience de la nécessité de se faire accompagner en thérapie, elle finit par se relever et sortir d’un fort sentiment d’impuissance.”
Dr. Ibrahim HAÏDARA
Psychologue clinicien et Promoteur de PSY2A (1er Cabinet de Psychologie au Mali)
Cabinet de Psychologie PSY2A
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Qu’est-ce qu’un Psychologue clinicien? Un professionnel chevronné qui sait écouter, écouter et écouter tout en évitant d’exposer ses émotions ou de se positionner par rapport aux récits de vie très douloureux ou choquants de ses patients.
Il est obligatoirement titulaire d’un diplôme universitaire d’au moins Bac +5 et de plusieurs années de stages pratiques liés à la Psychologie.