Je me suis longtemps demandée si je voulais partager cette expérience que je n’ai moi-même pas encore digéré, pardonné… Les derniers échanges que j’ai eu avec nombreuses d’entrevous me font me dire que je dois le partager et si cela touche 20 personnes, que 5 personnes partagent et que 2 ou 3 jeunes comprennent et se font diagnostiquer et ben… quelque chose aura bougé.
Quand j’étais au lycée, je me souviens m’être retrouvée à l’hôpital après avoir eu de fortes douleurs au ventre. Mon cerveau a effacé la sensation de douleur mais les souvenirs de moi en arc et ma mère impuissante sont encore si présents!
Après les analyses de sang et l’échographie, le médecin a diagnostiqué une dystrophie ovarienne. Il a dit que les douleurs allaient passer et il m’a prescrite un médicament pour calmer la douleur. Le médicament a effectivement calmé la douleur mais le médecin a manqué de dire à ma mère et moi que cette pathologie était incurable et qu’elle nécessitait une prise en charge holistique pour essayer de gérer les symptômes et éviter les maladies qui pouvaient en résulter. Il a manqué de nous dire tous les risques que j’encourais mais qu’on pouvait prévenir.
Alors pendant environ 13 ans, j’ai regardé mon corps se transformer, impuissant sans rien comprendre et sans rien pouvoir faire. L’aménorrhée (absence de règles) était devenu mon quotidien. Au début tu te demandes si tu es vraiment une femme et après tu t’y habitues mais tellement que les règles deviennent ton cauchemar.
L’acné était omniprésente et tout le monde te donne des astuces pour t’en débarrasser mais le plus difficile reste les remarques désobligeantes. Un moment j’en avais assez des rendez-vous dermato et j’ai appris à vivre avec mes boutons, à les aimer même.
Un moment, la cire chaude de l’esthéticienne n’est plus une source de douleurs mais de soulagement, de libération parce que ton hyperpilosité gène les gens qui te le font remarquer. Et tu en arrives à demander à Dieu pourquoi tu fais de l’hyperpilosité à des endroits de ton corps mais tes cheveux disparaissent doucement. Il ne peut pas juste mettre les poils là sur ta tête.
Les douleurs pelviennes et les crampes, j’ai appris à les gérer au quotidien et à prendre de petites pauses de 15 minutes pendant des journées de formation de 10h parfois.
La fatigue chronique et l’insomnie, j’ai eu plus de mal avec ça. J’ai été une des jeunes les plus dynamiques de ma génération et j’ai commencé à travailler dès l’âge de 18ans et je refusais la fatigue. Je partais à la fac publique le matin après une nuit blanche, au boulot l’après-midi en plus de mon militantisme pour finir mes journées dans les cours du soir de 17h à 21h. Tous les week-ends, j’ai eu des formations, que je donnais ou que je recevais. C’est trop je sais mais je n’ai jamais autorisé mon corps à ressentir de la fatigue. Il est jeune alors comment pouvait-il se fatiguer ?
Les périodes d’anxiété ont été les plus difficiles, ces périodes où tu n’es plus motivée à rien, où des idées sombres font leur fête dans ta tête en t’emmenant parfois à détruire ou à fragiliser des liens pourtant bien bâtis… L’incompréhension face aux troubles émotionnelles de tes proches. Tu te sens incomprise, aigrie, mal-aimée… c’est sûrement le plus difficile à gérer avec les troubles hormonaux.
En 13 ans, j’ai pris 90 kg sans aucune explication. Tu entends de tout et on te traite de tous les noms. Pour certains c’est un manque de volonté, pour d’autres un trop grand attachement à la nourriture ou de la paresse. Chacun donne son point de vue sur ta vie et ton poids te plongeant dans la dépression sans savoir ce que tu vis au quotidien. Ils les disent ces mots destructeurs qui te font perdre confiance en toi et t’enlèvent toute envie de devenir quelqu’un un jour.
Tu traînes en plus les conséquences de l’obésité: le diabète, l’hypertension artérielle, les protrusions discales et d’autres maladies et bien sûr tu t’exposes à l’infertilité. Je me considère comme une guerrière qui a survécu aux mots/maux de l’ignorance et de la méchanceté pour construire la jeune femme que je suis.
Puis, il y a environ 2 ans et demi, mon vrai diagnostic a été enfin posé: « Madame vous êtes atteinte du syndrome des ovaires polykystiques. Je vais vous donner des analyses complémentaires et nous mettrons une équipe pluridisciplinaire en place pour votre suivi … »
Je n’écoutais plus le médecin, je repassais dans ma tête toute ma vie et me disais mais c’était pas de ma faute. J’ai rien fait! Ce sont les hormones, ça n’a jamais été moi. J’étais tellement soulagée! J’avoue qu’il y avait de la peur mais il y avait surtout beaucoup de soulagement.
Depuis mon diagnostic, j’ai vu différents spécialistes (endocrinologue, gynécologue, nutritionniste, cardiologue) et je fais régulièrement tout ce qu’il faut pour prendre soin de moi et ça va.
Savoir m’a permis de prendre le contrôle sur mon corps et sur ma santé. Je ne suis plus en obésité aujourd’hui, je ne suis plus hypertendue, je ne fais plus de diabète et je suis réglée comme une horloge (ce dernier point est grave chiant quand t’es pas habituée.
Mon hygiène de vie et toutes mes actions concourent à bien gérer les symptômes de cette pathologie. Maintenant quand je sens une grande fatigue, je me donne le droit de me poser un petit moment et continuer après. Je sais quand les hormones me jouent des tours et que j’ai parfois besoin d’aide alors j’en demande… Je continue de travailler à rendre mon organisme insulino-résistant mais je vais très bien. Tout va bien!
Le syndrome des ovaires polykystiques est un dérèglement hormonal, une pathologie incurable mais savoir nous permet de bien gérer ses symptômes, prendre sa vie en main, faire des bébés et être bien dans son environnement. Toutes les femmes atteintes de cette maladie l’expérimentent différemment, certaines ont quelques symptômes, d’autres pas de symptômes physiques et il y en a aussi comme moi qui vivent les symptômes à l’extrême mais quelque soit votre niveau, le diagnostic permet de tout bien gérer. La santé, c’est ce que je vous souhaite mes chères amies car avec elle, nous n’avons pas de limite.
Paix, amour et santé